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Présentation : Le Rayon des Classiques
La fin d'Illa par José Moselli
José Moselli fut l'un des plus féconds romanciers d'aventures pour la jeunesse, durant
l'entre-deux guerres. Sous ce nom et sous d'autres pneudonymes (Jacques Mahan, André Fauconnier),
il publia dans les journaux « L'Intrépide »,
« L'Epatant », « Le Petit Illustré »,
« Le Cri-Cri », d'innombrables et flamboyantes épopées,
dont, à défaut d'un recensement complet, nous avons tenté de dresser une liste fragmentaire, que l'on trouvera en page 53.
Outre ces publications enfantines, il collabora également à des revues
« sérieuses », « Science et Vie »,
« Sciences et Voyages », « L'Almanach Scientifique ».
Un certain nombre de ses romans furent repris en fascicules, mais ils ne connurent pas en
général les honneurs de l'édition en librairie - ce qui les rend aujourd'hui si difficiles à
répertorier. José Moselli est avant tout un conteur d'aventures, de la lignée de Louis
Boussenard, moins les préoccupations didactiques. Son oeuvre est presque essentiellement
marine avec de vieux cargos rouillés, des yachts, des goélettes perlières du Pacifique.
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Son intérêt est souvent faible et réside avant tout dans la peinture des gens
de mer, des petits ports ignorés des grandes lignes. C'est que,
marin, il avait navigué à bord de ces voiliers et de ces tramps aux
pittoresques équipages dont il remplit ses romans, et que, de son
aveu, il connut ou rencontra nombre de ses personnages.
Dans « Science et Vie » ou « Sciences et Voyages », il donna
des romans et des nouvelles. Ces dernières sont de loin supérieures.
Les romans, en effet, sont interminables comme le veut la
tradition du feuilleton et, après de foudroyants démarrages, s enlisent
dans des péripéties sans nombre. A la base de ces romans
et nouvelles « pour adultes », se trouve toujours un thème très
plausible : la découverte d'un catalyseur de l'eau, apporté sans
doute par un aérolithe, dans « La Montagne des Dieux ». L'idée
de l'électricité cérébrale, bien avant son étude par les savants, dans
« La volonté d'Alexandre Bullen ». La conservation d'humains en
vie ralentie grâce à des chambres frigorifiques. Le détournement du
Gulf-Stream dans « Les Conquérants de l'abîme ». Ce court roman est
caractéristique de la manière de Moselli. La digue construite le sera au moyen des coraux,
acclimatés en eau froide ; la croissance de ces coraux sera accrue à l'aide de projecteurs
à infra-rouges, l'énergie nécessaire étant puisée dans l'électricité atmosphérique.
Mais il y a généralement une volonté de ne pas dépasser les
limites connues, de ne pas « anticiper », disons, qui confère à ces
romans une sorte de grisaille. Même « La guerre des Océans », avec ses
êtres humains transformés en amphibies, ne pourrait suffire à les tirer de la masse des romans
d'aventures. Cependant, il existe « La fin d'Illa », qui fait regretter
que l'auteur n'est pas eu pius souvent l'audace de s'abandonner à ses dons et à son imagination.
Ce roman, publié en 1925 dans « Sciences et Voyages », décrit une
civilisation situé dans un incroyable passé. Deux villes s'y disputent l'hégémonie : Nour,
immense, et Illa, bien plus petite, mais riche de science. Pour l'instant Illa est en possession
d'une arme étonnante : la pierre-zéro. Ce sont des noyaux atomiques qui dans certaines conditions
libèrent l'énergie qu'ils renferment. Grâce à elle. Illa peut détruire Nour à son gré. Mais un
savant d'Illa s'enfuit à Nour, emportant une partie du secret. Dès lors, c'est la guerre. Les
flottes d'Illa sont composées d'obus-volants : disques lenticulaires capables de vitesses
étonnantes...
Dès ce moment le lecteur d'aujourd'hui sourit, il a reconnu les soucoupes volantes, la bombe
atomique, le thème de la guerre préventive, les savants fugitifs. Et à mesure que le roman se
développe, il reconnaît davantage de personnages connus. Ce Rair,le dictateur d'Illa, massacrant
les habitants qui fuient leurs abris souterrains envahis par les gaz, accélérant de ses mains la
destruction de la cité pour ne pas accepter l'écroulement de son rêve, n' est-il pas une
préfiguration d'Adolf Hitler ?
Et son maître de la police secrète, avec son goût d'avilir les opposants, de les réduire à
la condition d'hommes-singes, avec ses tortures policières, avec les supplices interrompus
devant lesquels on fait défiler les foules, n'est-il pas bien mal déguisé sous le nom de Limh,
qui pourrait être découpé dans Himmler ?
Que finalement, après la capitulation épouvantée de Nour, le vainqueur soit aussi mal en point
que le vaincu, que la civilisation ait sombré et que l'explosion finale des stocks de
pierre-zéro efface toute trace humaine, nous avons lu de telles prophéties bien
des fois ces dernières années.
Seulement « La fin d'llla » fut publiée vingt ans avant Hiroshima. Et José Moselli eut
ce bonheur rare pour un romancier d'anticipation : prévoir non seulement les
conquêtes matérielles mais également l'évolution morale et jusqu'aux événements politiques.
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