Moi, je suis plutôt celui qui dit : « Ah ! »,
que celui qui dit : « Oh ! »

Mes chers Amis,

C'est en vain que l'on chercherait la phrase citée en exergue de la présente lettre dans l'œuvre écrite de Barjavel, et pourtant je pense que quelques milliers de personnes, voire bien plus, l'ont entendu de la bouche même de l'auteur, le 13 mars 1981, dans une exclamation spontanée qu'enveloppait sa voix grave et chaude... Il s'exprimait ce jour-là sur les ondes de France-Inter, en compagnie de Jacques Chancel, lors de la célèbre émission Radioscopie que celui-ci produisait et animait, et qui eut une longévité exceptionnelle. Nous aurions d'ailleurs pu commémorer l'anniversaire de la première de ces émissions ce 5 octobre, mais l'année 1968 est bien loin...
À la différence d'un bon nombre de personnalités qui y furent "radioscopées", aucune archive n'a été gardée et encore moins retranscrite de cette visite de René Barjavel. L'auteur lui-même la mentionne très brièvement dans son dernier article au Journal du Dimanche quelques jours après (le 15 mars 1981, cet article est retranscrit sur la page http://barjaweb.free.fr/SITE/ecrits/JDD/art_jdd.php?jma=150381) et ma curiosité m'a conduit à ne négliger aucune piste pour en retrouver une improbable trace, qui aurait survécu dans un tiroir, un grenier ou seulement un souvenir. Il en va ainsi pour de nombreux autres documents que je traque sans relache, dont "les Dossiers de l'écran" du 29 mai 1973 où l'auteur débattait en images et en public, sur le thème des hippies et de Katmandou. Un trésor peut-être perdu à jamais.
Mais les miracles existent, et tous les trésors ne sont pas perdus, même s'ils sont bien cachés. La préparation des Journées Barjavel 2004 fut l'occasion dès le printemps dernier de rendre d'amicales visites à des proches de l'auteur. C'est ainsi que j'ai reçu de sa filleule Paulette la cassette, fort précieuse, de cette émission. Elle avait en effet enregistré la conversation chaleureuse et passionnante, avec d'autres souvenirs de son parrain tout aussi précieux et dont j'aurai l'occasion de reparler.
On trouvera la retranscription intégrale, fidèle au document sonore existant, sur la page 

http://barjaweb.free.fr/SITE/documents/radioscopie/

Celui-ci est toutefois tronqué de ses premiers instants et de quelques dizaines de secondes correspondant au retournement de la bande. Le temps a prélevé sa part, quelques mots manquants comme quelques diamants ou quelques pièces d'or dérobés du butin. Il n'est pas exclu qu'on les retrouve un jour, ailleurs...
Ceux et celles qui étaient présents au Moulin Littéraire des Journées 2004 (http://journees.barjavel.free.fr/2004/) ont pu en entendre un court extrait venant comme citation illustrant la présentation que l'on retrouvera sur la page http://barjaweb.free.fr/SITE/themes/journalisme/rbmoulin.php. J'ai choisi de compléter la retranscription par des notes explicatives et complémentaires, visant à rendre compréhensibles au "jeune - et moins jeune - public" certaines allusions ou à donner des pistes d'approfondissement de points abordés par les interlocuteurs.

Ce Moulin Littéraire ensoleillé a été aussi l'occasion de faire la connaissance d'un journaliste lyonnais qui s'était trouvé en contact amical et régulier avec Barjavel dans les années 80, et qui a pu me fournir très aimablement des éléments de correspondance dans lesquels Barjavel, à l'été 1981, conclut avec une certaine amertume, et aussi soulagement, son expérience du journalisme qui aura duré près d'un demi-siècle. J'ai rétrospectivement incorporé ce témoignage essentiel dans la présentation du thème « René Barjavel, journaliste ». Mais surtout, Monsieur Pierre Monier m'a fournit une interview complète de notre auteur réalisée en 1984 par cassette magnétique interposée, dans laquelle l'écrivain répond à une liste de questions qui lui avaient été transmises au préalable par écrit. Parue dans un magazine régional aujourd'hui disparu, L'Hebdo-Lyon, cette interview est quant à elle retranscrite sur la page :

http://barjaweb.free.fr/SITE/ecrits/enchanteur/interview_pmonier.html

Consacrée principalement au personnage de Merlin et à L'Enchanteur (ce roman venait tout juste d'être publié), elle donne à Barjavel l'occasion d'indiquer l'une des motivations qui a déclenché en lui la décision de l'écrire... D'un point de vue plus formel, on pourra aussi y apprécier le talent de l'auteur à répondre aux questions de manière à laisser celles-ci s'enchaîner comme elles le feraient naturellement lors d'une conversation, une réponse introduisant la question suivante... Je tiens à préciser que Pierre Monier et René Barjavel ne se sont jamais rencontrés, rendons donc grâce aux cassettes, maintenant quelque peu désuètes, d'avoir porté notre auteur, dans le temps et l'espace.

Rendons grâces aussi à Françoise Sagan, cette chatte aux yeux de cocker, décédée ce 24 Septembre. C'est par ces mots que Barjavel rendait hommage à l'écrivain que nous retrouverons parmi tant d'autres lors d'un prochain rendez-vous, qui sera lunaire. Mais n'oublions pas de goûter l'instant présent, car c'est à notre tour de l'entendre, non plus en direct, mais sans avoir rien perdu de sa joie et de sa sincérité, nous dire qu'il est

plutôt celui qui dit Ah !, que celui qui dit Oh ! :

Pary sur Arche, le 10 octobre 2004

G.M. Loup.